Bernard ROUSSELET

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.

Victor Hugo

Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix
Qu'est-ce qu'on y voit, quand elle est fermée
On y voit la nuit en rond et les plaines et les monts
Des rivières et des vallons, on y voit toute une armée
Des soldats bardés de fer qui joyeux partent pour la guerre
Et fuyant l'orage des bois, on voit les chevaux du roi, près d'la rivière
Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix
Qu'est-ce qu'on y voit
Quand elle est fermée
On y voit mille soleils, tous à tes yeux bleus pareils
On y voit briller la mer et dans l'espace d'un éclair
Un voilier noir qui chavire
On y voit les écoliers qui dévorent leurs tabliers, des abbés à bicyclette, le 14 Juillet en fête
Et ta robe au vent du soir
On y voit des reposoirs qui s'apprêtent
Une noix
Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix
Qu'est-ce qu'on y voit
Quand elle est ouverte
Quand elle est ouverte, on n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
On n'a pas le temps d'y voir
On la croque et puis bonsoir
Les découvertes
Ha, une noix

Salut papa,
A l’heure où je t’écris, tu viens juste de nous quitter.
Nous sommes dans la cuisine avec Edgar et nous parlons des relations inter-générationnelles et de toi.
Tu t’es éteint le jour où l’on a appris que Léo avait sa licence. Alors on a apporté du champagne pour fêter ça avec toi. Je sais que tu aurais aimé déboucher une bonne bouteille pour l’occasion!
Alors faisons le maintenant!
Papa, je te remercie d’avoir été un super papi pour tes petits enfants. Ils se souviendront longtemps des moments passés avec toi dans le jardin ou dans le pré, d’ailleurs surtout dans le pré à conduire avec eux le tracteur.
Super top papi, super trop fortiche!
Aussi, je te remercie de m’avoir donné un si joli prénom.
C’est vrai j’aurais pu m’appeler Nadine comme le souhaitais mon frère Philippe mais tu as préféré Cécile.
Ça sonne mieux et puis c’est aussi une très jolie chanson.
D’ailleurs je ne connais pas de chanson écrite à propos d’une Nadine, ce qui signifie que ton choix était le bon.
Papa, nous n’avons pas été toujours d’accord. Surtout dans ma jeunesse. Mais lorsque tu es venu m’aider dans mon appartement à Pantin, il y a plus de 30 ans, nous avons beaucoup parler. Moi de mon ressenti et toi de ta jeunesse. Nous avons beaucoup pleuré tous les deux ce jour-là mais quel soulagement !
Nous pouvions enfin nous comprendre et surtout nous pardonner.
Et ce jour-là j’ai enfin compris que tu nous aimais très fort sans savoir le dire. D’ailleurs tu nous l’as prouvé moult fois en nous aidant bien les uns les autres.
Depuis de jour là nous nous disions je t’aime.
Je voulais aussi remercier maman, qui à toujours été là, pour nous et pour toi et même beaucoup pour toi. Même si parfois je me demande comment elle a fait pour nous supporter et aussi te supporter. Tu as eu de la chance d’avoir une épouse comme elle. Je te le dis. Mais de toi à moi, tu en as bien conscience.
Mon petit papa, je voulais mettre une boite à clou et un marteau dans ta boite afin que tu puisses te protéger des voleurs mais j’ai préféré déposer un bateau en papier qui fera partie de ton voyage. Peut-être que ce voyage sera en Egypte Antique et que tu descendras le Nil avec ce petit rafiau ? Va savoir?
Toi qui parlais de voyage que tu aurais aimé faire, je t‘offre de quoi naviguer où tu le souhaites.
Papa, une part de ce que je suis me vient de toi et je t’en remercie. Je t’aime.
Paix à toi.
Cécile

La grande plaine est blanche, immobile et sans voix.
Pas un bruit, pas un son ; toute vie est éteinte.
Mais on entend parfois, comme une morne plainte,
Quelque chien sans abri qui hurle au coin d’un bois.

Plus de chansons dans l’air, sous nos pieds plus de chaumes.
L’hiver s’est abattu sur toute floraison ;
Des arbres dépouillés dressent à l’horizon
Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.

La lune est large et pâle et semble se hâter.
On dirait qu’elle a froid dans le grand ciel austère.
De son morne regard elle parcourt la terre,
Et, voyant tout désert, s’empresse à nous quitter.

Et froids tombent sur nous les rayons qu’elle darde,
Fantastiques lueurs qu’elle s’en va semant ;
Et la neige s’éclaire au loin, sinistrement,
Aux étranges reflets de la clarté blafarde.

Oh ! la terrible nuit pour les petits oiseaux !
Un vent glacé frissonne et court par les allées ;
Eux, n’ayant plus l’asile ombragé des berceaux,
Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.

Dans les grands arbres nus que couvre le verglas
Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ;
De leur oeil inquiet ils regardent la neige,
Attendant jusqu’au jour la nuit qui ne vient pas.

Guy de Maupassant, Des vers

Je tenais à dire quelques mots, mais vous me pardonnerez, j’ai eu un peu de mal à les organiser.

D’aussi loin que je me souvienne, papi a toujours été extrêmement gentil et bienveillant envers moi, envers nous, ses petits-enfants.
Pour preuve, s’il en faut, les sourires éclatants que nous affichons sans exception sur toutes les photos de ces moments que nous avons eu la chance de partager.

J’ai tant de souvenirs.

Parmi eux, je me souviens de la fascination que j’avais, enfant, pour son atelier immense dont l’accès nous était interdit (pour notre sécurité il va sans dire), des énormes machines que j’y entrapercevais et des choses merveilleuses qu’il y fabriquait sûrement.
L’odeur de la sciure, l’odeur du bois, me ramène toujours à papi et son atelier plein de mystères, élucidés depuis. 
Et c’est une odeur d’enfance parmi mes préférées encore aujourd’hui.

Et puis il y a le champ, le potager, le verger, d’innombrables heures de cueillette et de récolte. Quelle chance ce fût pour nous, enfants des « villes », de bénéficier d’une telle proximité avec la nature, les mains dans la terre.
Et les « légumes du jardin » auront détrôné à jamais ceux du commerce : encore aujourd’hui, rien n’y fait, je ne sais cacher ma déception quand je mange des haricots verts qui ne vienne pas du saint jardin ! Ya pas à dire, nous avons acquis le vrai goût des bonnes choses.

Et tant qu’on parle de nourriture, Papi me disait toujours : 
« Vas-y dont, rajoute encore plus de sel, comme ça j’hériterai de ton violon ! »
Désolée papi, le violon reste avec moi finalement. Et tu serais ravi d’apprendre que j’ai enfin perdu cette mauvaise habitude. 

Ces dernières années, quand papi a dû ralentir ses activités, on a discuté un peu plus lui et moi. 
On a écouté de la musique ensemble, on a ri, on a chanté. Surtout du Brel. 
Ce sont des souvenirs d’une chaleur infinie.

Et il y a ce refrain, qu’il entonnait avec un grand sourire lors de notre dernier karaoké improvisé : 

« J’veux qu’on rie, j’veux qu’on danse
J’veux qu’on s’amuse comme des fous
J’veux qu’on rie, j’veux qu’on danse
Quand c’est qu’on m’mettra dans l’trou »
Papi ne voulait pas que nous soyons trop accablés, trop longtemps, quand il nous quitterait. Il nous aimait énormément, même s’il ne mettait pas toujours des mots dessus.

Il va beaucoup me manquer… Mais je sais qu’il célèbrera toutes mes victoires, et toutes mes joies, à mes côtés depuis le coin le plus tendre de mon cœur.
Il m’accompagnera partout, car je le garde près de moi.

Alix

Quel jour sommes-nous
Nous sommes tous les jours
Mon amie
Nous sommes toute la vie
Mon amour
Nous nous aimons et nous vivons
Nous vivons et nous nous aimons
Et nous ne savons pas ce que c'est que la vie
Et nous ne savons pas ce que c'est que le jour
Et nous ne savons pas ce que c'est que l'amour.

Enfance à Pouzy Mésangy

Nous partageons votre peine en ce moment de deuil et vous présentons nos sincères condoléances